Bientôt la rentrée et votre enfant est stressé ? A-t-il du mal à s’endormir ou un sommeil très agité ? Il a mangé trop vite et a des nausées ? Dans ces conditions, vous pourriez être tenté de lui donner quelques gouttes de CBD pour le calmer ou l’apaiser. Mais est-ce une si bonne idée ?
Considéré comme une alternative naturelle ou un traitement possible des petits maux du quotidien comme le stress, la douleur ou les troubles du sommeil, le CBD est déconseillé aux enfants.
Le CBD : c’est quoi ? Quelle différence avec le cannabis ? Est-ce dangereux pour les mineurs ?
Le CBD, ou cannabidiol, est l’une des molécules présentes dans la plante de chanvre. C’est une plante complexe, composée d’une multitude de molécules (plus de 200 cannabinoïdes) dont le CBD (cannabidiol) et le THC (tétrahydrocannabinol).
C’est sur la base de ces substances que le cannabis est considéré comme illégal ou non. Lorsque la plante est riche en THC, sa consommation dite « récréative » est interdite en France. Cette molécule particulièrement psychoactive peut provoquer des troubles de la mémoire et de l’attention, une forte dépendance, et son effet euphorisant peut entraîner des hallucinations.
D’autre part, certaines variétés de cannabis ont un taux élevé de CBD et sont sans risque d’accoutumance. La consommation de ces variétés dites « bien-être » est tout à fait légale en France (tant que les plantes ne contiennent pas plus de 0,3 % de THC). D’où les boutiques CBD qui ont fleuri un peu partout en France. Revendiquant des effets positifs sur la santé et apaisants sur le moral, ces vendeurs de nouvelle race ne taisent pas d’éloges sur ce produit soi-disant naturel. Il est vrai qu’elle possède de nombreuses vertus : relaxante et analgésique, elle est connue pour apaiser les migraines, les douleurs, mais facilite également le sommeil. Une étude a également montré que le CBD peut, dans une certaine mesure, aider certains fumeurs de cannabis à arrêter leur consommation. Cela intéresse même les scientifiques et les médecins : selon plusieurs études scientifiques, l’utilisation du CBD pourrait avoir des propriétés médicinales.
Le cannabis thérapeutique expérimenté comme traitement chez les enfants malades
Si le CBD est considéré comme un allié thérapeutique dans certains pays comme la Suisse ou la Grande-Bretagne, en France, son utilisation fait toujours l’objet de recherches médicales. Une expérimentation suivie d’un Comité Scientifique Temporaire (CST) a également été lancée en mars 2021 par l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) sur l’éventuel usage du cannabis thérapeutique par les professionnels de santé et les patients. Depuis, 3 000 patients atteints de pathologies graves et souffrant de symptômes tenaces ont pu accéder à des produits dérivés du cannabis délivrés en pharmacie et sur prescription médicale. L’objectif est de savoir si cette plante peut réellement être utile dans certaines indications comme les douleurs neuropathiques, les situations palliatives ou certaines formes d’épilepsie sévère qui s’opposent aux traitements existants.
Pour les enfants, le CBD peut donc être prescrit pour mieux supporter les effets secondaires d’une chimiothérapie dans le cadre d’un traitement contre le cancer, ou en cas d’épilepsie. C’est notamment le cas d’Epidyolex, le seul médicament à base de cannabis destiné aux enfants, à partir de 2 ans. Il est autorisé provisoirement par l’ANSM pour le traitement des formes sévères d’épilepsie. Il est prescrit pour réduire la fréquence et l’intensité des crises lorsqu’elles sont associées au syndrome de Lennox-Gastaut et au syndrome de Dravet. Alors qu’un rapport d’évaluation de l’expérimentation a été présenté en septembre dernier au Parlement, ce dernier devrait, d’ici mars 2023, se prononcer sur l’intérêt ou non de maintenir le cannabis médical comme traitement alternatif ou complémentaire. .
Tisane, bonbon, huile : peut-on vraiment donner du CBD aux enfants pour les calmer ? A partir de quel âge peut-on prendre du CBD sans danger ?
Tisanes, huiles, limonade, sirop, fleurs de chanvre riches en CBD… Le CBD peut être consommé de multiples façons. Pour les enfants, de nombreux sites de vente recommandent de mâcher des bonbons, des gâteaux cuisinés avec des fleurs en poudre, ou encore des huiles à mettre sur la langue.
Considéré comme un produit naturel, certains parents peuvent souhaiter en donner à leurs enfants pour, par exemple, calmer leurs angoisses, les aider à s’endormir ou à se concentrer en classe. Cependant, même si cela semble tentant, non, vous ne donnez pas de CBD à votre enfant pour le calmer. D’autant qu’en France, la vente est interdite aux mineurs.
Bien que le CBD ne soit pas techniquement considéré comme une drogue (contrairement au THC), il a tout de même des effets toxiques lorsqu’il est consommé à fortes doses. Bien que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) admette dans l’une de ses réunions, « que sous forme pure, le cannabidiol (CBD) ne semble présenter aucun potentiel d’abus, ni être nocif pour la santé », elle émet de sérieuses réserves sur le produit. . . Tout comme l’Académie de pharmacie qui prévient que « le CBD n’est pas une molécule anodine. En effet, des essais cliniques menés avec du CBD sous forme pure (…) ont montré que ce médicament pouvait provoquer de nombreux effets indésirables (somnolence, troubles digestifs, fièvre, fatigue, perte d’appétit, dommages au foie, etc.) et qui devrait également s’inquiéter des interférences avec d’autres médicaments. » Elle met notamment en garde contre l’utilisation du CBD en dehors du domaine médical. En tout cas, selon la pédiatre Catherine Salinier : « On ne donne pas à un enfant une substance qui n’a pas été contrôlée, spécifiquement créée pour les enfants, ou prescrite par un médecin ». Quel que soit le trouble dont souffre votre enfant, vous ne devez pas vous soigner vous-même, mais vous rapprocher de votre médecin. « Surtout parce que donner à son enfant un traitement, même naturel, c’est lui dire qu’il y a une réponse médicale à tout, mais souvent il y a d’autres solutions ».
L’ANSM est d’ailleurs très claire sur le sujet : « Bien qu’il puisse présenter un intérêt dans le traitement de certaines formes sévères d’épilepsie, le CBD a des effets psychoactifs, peut être potentiellement toxique pour le foie. Il est également susceptible d’augmenter les concentrations dans le l’organisme de certains médicaments, notamment les antiépileptiques, avec le risque d’augmenter leur toxicité ». Il est donc tout à fait possible de donner du CBD à votre enfant, mais uniquement dans le cadre de soins médicaux et sous le contrôle strict d’un médecin. D’autant que si le THC et ses effets ont été largement étudiés, ce n’est pas encore le cas du CBD. Cette molécule est encore peu connue et il est encore difficile, du fait de la littérature scientifique, de connaître ses éventuels effets nocifs chez l’enfant. Même administré à petites doses, le principe de précaution est donc essentiel pour le CBD.
Une filière trouble et pas assez contrôlée
Si les produits à base de CBD et leurs ventes sont de plus en plus réglementés, notamment depuis l’autorisation officielle de vente de fleur de chanvre enrichie en CBD, pour le moment, la traçabilité des produits n’est pas garantie. En dehors des circuits pharmaceutiques, le CBD vendu dans les cafés spécialisés et autres serres, ou sur internet n’est pas toujours contrôlé, la traçabilité des produits est difficile et les normes sanitaires ne sont pas toujours respectées. « Il n’y a aucune obligation de traçabilité ou exigence en terme de qualité, hormis la limitation du THC à 0,3% », assure Nicolas Roumat, producteur et fondateur de la société « Le chanvre de mon père ». S’il a choisi d’offrir à ses consommateurs une traçabilité complète de ses produits riches en CBD, de l’ensemencement à l’envoi en passant par l’extraction, ce n’est pour l’instant pas une obligation pour tous les producteurs et vendeurs.S’il n’y a pas de réglementation stricte, c’est facile. acheter ou commander du CBD de mauvaise qualité voire contenant des produits toxiques. « Kabbo est une plante qui peut nettoyer le sol. Planté sur un terrain contaminé, il contiendra lui-même des polluants », explique Nicolas Roumat. « Certaines méthodes d’extraction du CBD de la plante sont aussi parfois discutables, et certaines utilisent des alcools ou des solvants comme l’éthanol », poursuit-il. Enfin, même si le taux de THC est strictement limité à 0,3 %, rien n’oblige les producteurs à contrôler leurs produits en laboratoire avant leur commercialisation. Par conséquent, il n’y a aucune garantie sur la teneur en THC d’un produit. Certains producteurs peuvent ne pas respecter les niveaux légaux sans s’en soucier, voire modifier ou ajuster la teneur en CBD par voie chimique (CBD synthétique) tout en marquant « bio » sur l’étiquette. Des pratiques scandaleuses qui nécessitent donc de la prudence.
Peut-on prendre du CBD pendant qu’on allaite son bébé ?
Sachant que le lait maternel dépend en grande partie de ce que la mère ingère, il est également préférable de sauter le CBD pendant l’allaitement. Selon une étude américaine de 2018, le THC est présent dans le lait maternel jusqu’à 6 jours après avoir fumé du cannabis à des fins récréatives. Même si la dose de THC consommée par le bébé est assez faible, les scientifiques ne savent toujours pas si cela représente un danger ou non. Si, comme c’est souvent le cas, la plupart des données existantes concernent le THC et non le CBD, le même principe de précaution s’impose.
En supposant que les produits riches en CBD consommés en France ne contiennent que 0,3% de THC, comme l’exige la réglementation, sa seule présence suffit à limiter les risques pour le bébé. Pour cette raison, il est préférable de ne pas consommer de CBD (ou de cannabis récréatif riche en THC) si vous souhaitez allaiter.
Dans tous les cas, si vous avez consommé du CBD pendant ou après votre grossesse, ou si vous envisagez d’en consommer, parlez-en au préalable avec votre médecin ou votre sage-femme. Il en va de même avant d’envisager de donner du CBD à votre enfant. D’autres solutions, naturelles ou médicamenteuses, peuvent être trouvées pour résoudre des problèmes de santé mineurs ou calmer les angoisses de votre enfant.