En Chine, un modèle économique sans souffle

Publié le 13 octobre 2022 à 16 h 00 Mis à jour le 14 octobre 2022 à 13 h 57

Bien que le Congrès du Parti communiste ne soit pas le théâtre d’annonces majeures de politique économique, la communauté des affaires sera à l’affût du moindre indice dans le discours que Xi Jinping prononcera dimanche, tant il y a d’incertitude sur la trajectoire de la deuxième plus grande économie.

La Chine connaît actuellement un sérieux ralentissement, confrontée à de nombreux défis intérieurs alors que l’environnement extérieur se durcit. La politique « zéro Covid » reste très stricte, pesant sur la consommation des ménages et l’activité des entreprises. L’apparition de nouveaux cas de Covid 19 entraîne des confinements généralisés ou ciblés, laissant les Chinois vivre sous la menace permanente de nouvelles restrictions. Le secteur immobilier s’effondre : les ventes et les mises en chantier chutent depuis un an et les prix chutent dans de nombreuses villes moyennes. Les effets se répercutent sur de nombreux secteurs de l’économie. En intégrant les filières amont (ciment, sidérurgie…) et aval (mobilier…), l’immobilier représente environ 30% du PIB.

Naviguant à vue, les entreprises étrangères suspendent leurs projets dans le pays, s’inquiétant des tensions croissantes entre la République populaire de Chine et Taïwan, notamment depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie. A l’extérieur, la guerre technologique menée par les Etats-Unis freine la montée en gamme de Pékin, à la traîne dans les semi-conducteurs avancés. Et la demande de made in China devrait s’affaiblir alors que la récession menace certains grands partenaires commerciaux.

« Des choix difficiles »

Pour 2022, l’objectif de croissance de 5,5 % est désormais hors d’atteinte. Pour la première fois en trente ans, la croissance économique tombera en dessous de celle du reste de l’Asie. Le FMI ne prévoit qu’une hausse du PIB de 3,2% cette année puis de 4,4% en 2023. La situation de l’emploi, pilier de la stabilité sociale et de la légitimité du Parti, est préoccupante, notamment chez les jeunes confrontés à un taux de chômage urbain record ( 18,7% en août officiellement).

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Le ralentissement économique de la Chine, qui a débuté il y a une dizaine d’années, s’accélère. Les freins conjoncturels accroissent la pression sur une économie confrontée à des défis structurels (vieillissement de la population, baisse de la productivité, endettement galopant, inégalités de richesse record, etc.). Xi Jinping a renforcé le rôle du Parti dans l’économie et fait passer la sécurité nationale et l’idéologie avant la croissance. « Alors que l’expansion du secteur privé est appelée à devenir une force menaçant la position de leadership du PCC, le contrôle de l’économie deviendra encore plus strict après le 20e Congrès », prédit Chen Daoyin, un universitaire chinois exilé au Chili.

« Le président Xi, après avoir reçu un troisième mandat, sera fortement incité à maintenir des politiques budgétaires et monétaires expansionnistes pour brosser un meilleur tableau de la croissance », a déclaré Alicia Garcia Herrero, économiste en chef pour l’Asie chez Natixis. Cependant, la marge de manœuvre est beaucoup plus limitée que par le passé. « En raison des contraintes financières, de la poursuite probable de la politique ‘zéro Covid’, de la perte du moteur immobilier, « les perspectives de croissance de la Chine sous le nouveau mandat du président Xi devraient être décevantes et ne pas dépasser 3 % en 2023 et au-delà », poursuit l’économiste.

Confronté à un modèle de croissance basé sur l’investissement défaillant, le Parti « devra faire face aux choix économiques les plus difficiles qu’il ait eu à faire depuis des décennies », prévient Michael Pettis, professeur à l’Université de Pékin dans le magazine « Foreign Affairs ». Pékin « peut sortir d’un modèle de croissance qui a généré beaucoup de richesses, mais au prix d’une escalade des inégalités, d’une dette croissante et d’une quantité croissante d’investissements gaspillés. Ou elle peut choisir de maintenir son modèle économique actuel pendant quelques années jusqu’à ce qu’il est contraint, par ses coûts croissants, à une transition encore plus douloureuse.