Choix des arbres, paillage ou création de microclimats : jardiniers et paysagistes donnent leurs conseils pour adapter au mieux votre jardin aux effets du changement climatique.
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Avec le changement climatique, l’entretien d’un jardin peut s’avérer plus complexe, notamment face aux restrictions d’eau.
JARDINAGE – « C’est quelque chose qu’il ne faut en aucun cas envisager à court terme, cela prendra au moins quelques mois », commence Jean-Paul Thorez, joint par téléphone, depuis le Sud. L’auteur de Solutions pour un jardin résilient (Terre Vivante, 2022) l’affirme d’emblée au HuffPost : adapter son jardin aux effets du changement climatique « cela nécessite de changer sa façon de jardiner ».
Canicules successives, températures moyennes plus élevées, mais aussi précipitations plus intenses et épisodes orageux : les effets du changement climatique se font déjà sentir en France, et notamment dans les jardins privés, très consommateurs d’eau. « Il faut 300 à 900 litres d’eau, selon les conditions, pour développer 1 kg de matière sèche végétale (10 % du poids d’une plante) », rappelle Jean-Paul Thorez dans son livre.
Alors, comment faites-vous face à ces effets, y compris les pénuries d’eau ? Le jardinier Jean-Paul Thorez et la paysagiste Joëlle Roubache apportent des conseils complémentaires au HuffPost.
Se concentrer sur les arbres

Première étape : Faites attention aux arbres que vous plantez. « Une des solutions est de choisir des végétaux plus résistants à la chaleur, notamment des arbres car ils ont une durée de vie de plusieurs années. Il faut anticiper que le réchauffement climatique sera plus fort et choisir des espèces peu consommatrices d’eau », souligne Joëlle Roubache. Le paysagiste illustre : « Par exemple, vous devriez opter pour un chêne vert plutôt qu’un saule pleureur ».
« Les fleurs, de toute façon, c’est compliqué de faire une sélection, elles ont généralement besoin de beaucoup d’arrosage. Mais on peut déjà éviter les roses qui consomment beaucoup d’eau », ajoute-t-elle alors.
« En plus des cerisiers ou des pommiers dont nous avons l’habitude, on peut s’orienter vers des espèces un peu plus résistantes à la sécheresse, comme les figuiers. Il s’adapte à des régions de plus en plus vastes car les hivers sont aussi plus doux », conseille Jean-Paul Thorez. Vous pouvez aussi opter pour des abricotiers, note le spécialiste.
Autre suggestion du jardinier : l’olivier. « Il fait fureur en ce moment car c’est un arbre très résistant à la sécheresse, mais il ne va pas forcément produire plus que dans sa zone habituelle, la zone méditerranéenne, car il manque d’heures d’ensoleillement », rappelle le journaliste et auteur de Solutions pour un jardin résilient.
Créer des zones de fraîcheur
En plus de renouveler votre palette végétale, il est important d’aménager ingénieusement votre jardin, afin de créer des zones de fraîcheur. « Une des solutions est d’apporter de l’ombre en plantant des arbres, créant ainsi de la fraîcheur pour les autres végétaux », soutient Joëlle Roubache.
Jean-Paul Thorez nous invite à « prévoir différents microclimats ». « Le microclimat, c’est à la fois l’exposition, l’humidité, un ensemble d’éléments […] l’idée est de mettre les plantes au bon endroit, de les protéger des excès », explique-t-il. « On peut par exemple planter des haies, poser des palissades ou façonner le sol pour faire des buttes », illustre-t-il.
« Pour les haies, il faut choisir parmi des espèces résistantes à la sécheresse. Le laurier peut par exemple être utilisé de cette façon […]. Dans tous les cas, il faut penser à un mix et ne pas hésiter à planter une haie diversifiée, ça permet à la fois de lutter contre la sécheresse et contre la crise de la biodiversité », ajoute-t-il.
Les bonnes pratiques jardinières à adopter

Certaines pratiques de jardinage aident également les plantes à mieux résister à la chaleur élevée. « Il vaut mieux planter un arbre à l’automne qu’au printemps. Avec le sol encore chaud et les pluies qui arrivent, il s’installera lentement. Si on fait la même chose au printemps, il n’aura pas assez de racines pour absorber l’humidité. Vous pouvez aussi utiliser cette technique pour les vivaces et les arbustes », conseille Jean-Paul Thorez.
« Une pratique à laquelle nous pouvons également penser est le paillage. C’est l’idée de mettre des copeaux de bois entre le sol et les végétaux pour préserver la fraîcheur, et ça permet aussi d’éviter le désherbage », ajoute Joëlle Roubache.
Une autre pratique, récemment mise en avant par la ville de Colmar, qui peut s’avérer utile face à la sécheresse, consiste à utiliser « toutes les eaux de récupération non polluées ». Cela concerne par exemple l’eau des seaux à glace, des fonds de carafe ou encore l’eau de lavage des légumes.
Attention toutefois à ne pas prendre les épisodes de canicule comme seuls paramètres nouveaux, préviennent les amateurs de jardinage. « Un jardin vit toute l’année, il ne faut pas s’arrêter à la sécheresse, il y a aussi des pluies torrentielles ou des gelées à prendre en compte », rappelle Jean-Paul Thorez.
Face aux impressionnantes averses de grêle de juin 2022, le jardinier n’a pas de solutions mais déconseille aux gelées tardives de choisir des variétés de plantes qui ne fleurissent pas trop tôt. « Les plantes rustiques comme le romarin ou le chêne vert résistent bien au froid de l’hiver et à la chaleur », poursuit Joëlle Roubache.
Abandonner la pelouse ?

Enfin, qu’en est-il de la pelouse, qui nécessite beaucoup d’eau ? « La pelouse n’est plus forcément une bonne idée ou bien il faut accepter de la voir sécher quelques mois, et redevenir verte avec les prochaines pluies », appuie Jean-Paul Thorez. Joëlle Roubache partage le même avis : « Il faut évoluer et adapter notre regard : en automne il y a des feuilles qui tombent, en été la pelouse est sèche, ça fait partie des choses à accepter ».
Les deux spécialistes conseillent en effet « de ne pas lutter contre la nature ». « Nous allons progressivement changer de gamme : il faut s’attendre à ce que certains arbres que nous avons plantés meurent. Quand vous les remplacez, il ne faut pas hésiter à développer votre gamme végétale », conclut Jean-Paul Thorez. De quoi épargner la chèvre et le chou.
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