Publié le : 23 octobre 2022 à 13h10
Directeur du Centre régional de coordination des dépistages des cancers (CRCDC), le Dr Franck Le Duff rappelle l’importance du dépistage organisé, pris en charge par l’Assurance maladie, pour permettre une détection maximale des cancers du sein.
Docteur, quelles sont les principales missions du Centre de dépistage coordonné que vous dirigez ?
Nos missions sont établies par l’Institut National du Cancer avec un cahier des charges à respecter.
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Dans ce cadre, donc, nous menons un certain nombre d’actions : assurer la sécurité des dossiers des personnes cibles des projections. Invitez les populations affectées au dépistage. Participer à la sensibilisation et à l’information des populations sinistrées. Organiser la formation des médecins et professionnels de santé sur le dépistage ; suivi des projections ; garantir la qualité de l’appareil ; ou collecter des données pour la gestion et l’évaluation du programme. Il faut ajouter que le CRCDC organise la consultation de risque aigu de cancer en relation avec l’Institut Paoli-Calmettes. En tant que spécialiste en oncogénétique, je travaille sur l’augmentation du risque de cancer dans les familles multicancer. Cette consultation d’évaluation des risques permet d’offrir un dépistage et un suivi personnalisés aux personnes, notamment les jeunes, ayant une prédisposition familiale au cancer, notamment du sein et du côlon.
Concernant plus spécifiquement le cancer du sein, la détection précoce semble être la meilleure arme…
L’intérêt est de pouvoir traiter plus facilement ce cancer et de limiter les séquelles liées à certains traitements. C’est pourquoi le programme de dépistage organisé du cancer du sein vise à détecter les lésions cancéreuses afin de les traiter le plus tôt possible. Il est destiné aux femmes âgées de 50 à 74 ans sans facteur de risque autre que leur âge. Elles sont invitées à participer tous les 2 ans, avec un remboursement à 100% (mammographie et examen clinique des seins) par l’Assurance Maladie. La mammographie, qui doit désormais être numérisée, permet le repérage de petites tumeurs localisées, sans atteinte ganglionnaire, avec un pronostic très favorable. Il bénéficie d’une double lecture par un radiologue expérimenté dans le cadre de ce programme. Parmi les cancers détectés par dépistage organisé, environ 10% le sont grâce à cette seconde lecture.
L’orientation des femmes vers les modalités de dépistage adaptées à leur situation est donc essentielle…
Sur l’île, 7 016 femmes, soit 36,7 %, des 29 281 femmes éligibles au dépistage (population INSEE) ont subi une mammographie dans le cadre du dépistage organisé en 2021 contre 30,5 % de participation en 2020. c’est trop faible par rapport aux chiffres de autres régions et la moyenne nationale qui est de 50,6 %. Beaucoup de femmes font leur mammographie individuellement, sans passer par l’invitation CRCDC-Corsega, et ne bénéficient donc pas de la relecture des images mammographiques (2e avis). Dans ce cas, une perte de chance est à craindre.
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Encore une fois, j’insiste sur le fait qu’il ne faut pas faire la mammographie trop tôt, et par contre, je regrette que certains radiologues fassent trop de radiographies individuellement et pas de façon organisée. C’est d’autant plus important qu’une femme sur huit développera un cancer du sein au cours de sa vie. Et près de 80 % des cancers du sein se développent après 50 ans.
Ces dernières années, Octobre rose est devenu incontournable pour faire passer le message de la prévention et du dépistage chez les femmes…
C’est vrai qu’il y a un réel impact d’Octobre Rose dans le nombre de projections réalisées. Et nous avons fait beaucoup de progrès puisqu’aujourd’hui nous sommes à 99% de guérison pour les cancers détectés précocement. Cependant, l’épidémie de Covid a également eu un impact important et on a constaté une baisse importante des consultations dans tous les hôpitaux de l’île. Il faut donc se mobiliser et sensibiliser tout au long de l’année.
Vous êtes à l’origine d’une nouvelle application « Mondépistagecancer ». En quoi consiste cette innovation ?
Il s’agit d’une application amusante qui fournit un calcul de nos facteurs de risque de cancer.
L’application, désormais développée avec le centre de dépistage de la démarcation Paca, propose également des informations sur les différents types de cancer et les coordonnées du centre de dépistage le plus proche.
Le but, évidemment, est de se faire tester tôt pour un meilleur traitement.
D’autres types de cancers sont aussi concernés par le dépistage…
Le centre prend en charge les trois types de cancer : côlon, sein et col de l’utérus.
Pour le côlon, je vous rappelle de vous procurer une trousse gratuite auprès de votre médecin, du CRCDC ou encore de votre pharmacien. Il s’agit d’hommes et de femmes âgés de 50 à 74 ans. Et je précise qu’il ne s’agit pas d’une coloscopie.
Pour le dépistage du col de l’utérus, le centre adresse un courrier aux assurées âgées de 25 à 65 ans ainsi qu’un suivi si le prélèvement n’est pas effectué dans l’année. Ce dépistage s’adresse à toutes les femmes, y compris les femmes vaccinées ou non contre le virus HPV. Elle affecte également les femmes enceintes. A noter que si le frottis est actuellement recommandé tous les trois ans après 25 ans, jusqu’à 65 ans, la Haute Autorité de Santé préconise depuis peu un prélèvement permettant la recherche du virus au niveau de l’échantillon.
L’île est devenue région expérimentale pour le dépistage du cancer du poumon. Y a-t-il des avancées notables constatées pour le projet baptisé Acapulco ?
Nous sommes toujours activement impliqués dans l’expérimentation du dépistage du cancer du poumon. Le projet Acapulco a permis de mettre en place un dépistage basé sur un scanner à faible rayonnement non injecté. Nous sommes la seule région qui pratique cette projection pour le moment.
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Il y a 268 personnes inscrites au projet et 4 cancers ont été détectés jusqu’à présent. Les résultats sont très attendus car il s’agit de savoir si une généralisation du dépistage peut être intéressante, comme pour le cancer du sein.
Nous espérons atteindre 300 patients examinés l’année prochaine afin d’obtenir des résultats plus probants.
Contact : 04 95 34 56 78 du lundi au vendredi de 9h00 à 16h00 ou par mail : depistages@crcdc-corse.fr