« Légalisation du CBD : l’heure du fair-play » – table ronde par Sacha Benhamou

L’administration doit aujourd’hui tirer toutes les conséquences de la jurisprudence du Conseil d’Etat et cesser de s’acharner sur ce secteur qui pourrait peser 1,5 milliard d’euros en 2023 pour plus de 2000 points de vente

Le 29 décembre 2022, le Conseil d’État inflige une nouvelle défaite à l’administration du CBD. Déjà en 2019, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait condamné la France pour son interdiction du CBD, le cannabidiol n’ayant « aucun effet psychotrope ni effet nocif sur la santé humaine ». . La France disposait alors de deux ans pour se mettre en conformité et publier une législation conforme à la jurisprudence européenne. Le 30 décembre 2021, à l’occasion des fêtes de fin d’année, le ministère de la Santé a discrètement publié un arrêté a minima qui ignore non seulement les recommandations du secteur, mais aussi l’ampleur de la condamnation de la France. En effet, le décret interdisait la vente de fleurs et de feuilles crues, même si très pauvres en THC, elles ne pouvaient être considérées comme des stupéfiants.

Comme prévu, le Conseil d’État a annulé cette disposition du décret, rappelant qu’une interdiction générale et absolue n’est pas proportionnée aux risques sanitaires, une petite victoire pour l’État de droit.

Attraction. La France a déjà perdu plusieurs entrepreneurs qui ont monté leur industrie chez nos voisins, une nouvelle tentative de restriction, futile compte tenu de la dernière jurisprudence, ne ferait qu’entraîner une perte d’attractivité alors que le secteur explose. Si l’on ne peut nier la dangerosité de la combustion, l’administration ne peut ignorer que les produits bruts font l’objet d’autres modes de consommation comme la vaporisation et l’infusion. Les nouvelles dispositions devront les recommander et les encourager, mais elles ne pourront plus interdire le produit.

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L’administration devra également mettre en cohérence l’ensemble de notre législation, à commencer par les contrôles routiers. Selon un sondage Ifop de juillet 2022, un quart de la population française, tous âges et toutes catégories sociales confondus, consomme aujourd’hui du CBD. Alors que la loi tolère des traces de THC, le composé psychotrope, dans les produits CBD, les tests de salive employés par les forces de l’ordre sont trop sensibles pour faire la distinction entre la consommation de stupéfiants et de CBD, ce qui entraîne des poursuites souvent absurdes. Enfin, ce sont les obstacles auxquels sont confrontés les producteurs français qu’il faudra lever, comme leur accès au financement bancaire.

L’administration doit désormais tirer toutes les conséquences de la jurisprudence du Conseil d’Etat et cesser de traquer ce secteur qui pourrait peser 1,5 milliard d’euros en 2023 pour plus de 2000 points de vente. Tous les acteurs de la filière – producteurs, vendeurs et consommateurs – doivent être réunis pour définir un cadre juridique juste et prévisible. L’Etat le doit à tous les Français qui soutiennent les bienfaits du CBD et à tous nos entrepreneurs qui ont refusé que la France soit en retard sur l’Europe sur ce sujet.