« Le seul vrai pouvoir des syndicats est de quitter la table des négociations ou de s’opposer à l’application d’un amendement. Nous en sommes venus là car ce modèle conventionnel doit être complètement revu », estime François Randazzo, président du syndicat de kinésithérapie Alizé. dans ce forum.
« En l’espace de quelques jours, pas moins de trois professionnels de santé libéraux ont claqué la porte de la Caisse nationale d’assurance maladie, mettant ainsi en lumière l’essence du modèle conventionnel tel qu’il existe aujourd’hui.
Le 16 janvier, les kinésithérapeutes libéraux, après l’opposition du syndicat Alizé et du SNMKR, ont rejeté la demande d’agrément signée quelques jours plus tôt par la FFMKR. Notre profession a donc emboîté le pas des sages-femmes qui l’avaient fait quelques jours auparavant, dénonçant des « pseudo-négociations ». Jeudi 19 janvier, c’était au tour des médecins libéraux de quitter la table des négociations, mettant ainsi un terme à des négociations conventionnelles mal entamées.
Les relations entre l’Assurance maladie et les professionnels libéraux de santé, régies par des conventions qui définissent, pour chaque profession, les tarifs des actes et les modalités d’exercice de ceux-ci, n’ont cessé de se dégrader. Ces conventions sont révisées tous les cinq ans pour revoir le montant des droits et faire évoluer les modalités d’exercice pour accompagner l’évolution de notre système de santé. Ces rendez-vous quinquennaux sont indispensables pour maintenir l’attractivité de nos métiers de santé et maintenir une offre de soins en adéquation avec les besoins de nos concitoyens. Il doit également permettre de développer cette offre de soins afin qu’elle tienne compte des problématiques actuelles de santé publique, comme l’accès à l’assistance sur l’ensemble du territoire et bien sûr sa qualité.
Or, ce qui devrait être un moment d’échange privilégié où seront relativisés les droits et devoirs des professionnels de santé pour les faire évoluer pour mieux répondre aux besoins de notre système de santé, se réduit à une négociation quasi exclusivement financière la contrainte du libéralisme les frais sont élevés. En effet, si l’on compare les honoraires des différentes professions de santé avec la moyenne européenne, on constate que les tarifs appliqués en France sont nettement inférieurs. L’acte le plus courant en France pour les kinésithérapeutes (durée 30 minutes) est de 16,13 € contre 21 € en Allemagne, 28,60 € en Belgique et environ 35 € en Espagne.
La comparaison de l’évolution de la rémunération moyenne des différentes professions de santé par rapport à l’inflation est également riche d’enseignements. Pour les kinésithérapeutes, la baisse par rapport à l’inflation est de 24% en quinze ans. Si, pendant longtemps, nous avons augmenté notre amplitude de travail hebdomadaire, avec des semaines de plus de 50 heures, cette possibilité a aujourd’hui atteint ses limites. Face à cette situation, le défi est d’assurer la pérennité économique de nos pratiques et de maintenir la qualité des soins que nous prodiguons.
Dans ce contexte, les kinésithérapeutes fondaient de grands espoirs sur ces négociations de traité. Cependant, sous la pression d’un contexte économique restreint, et bien sûr un peu par la perspective que des honoraires peu élevés incitent les professionnels à multiplier les aides et ainsi répondre à la demande de soins de nos concitoyens, l’Assurance maladie a proposé une convention qui ne permet pas l’inflation. compensée, notamment grâce à un calendrier d’application des réévaluations trop étalé dans le temps. C’est l’une des principales raisons qui poussent aujourd’hui les kinésithérapeutes à adresser une excuse d’irrecevabilité à l’Assurance Maladie, comme les sages-femmes et les médecins.
« Indexer les honoraires des professionnels de santé à 70% sur l’inflation »
Les professionnels de santé libéraux ne peuvent se résoudre à soutenir l’avènement de la santé à moindre coût, mais le rapport de force entre leurs représentants et l’Assurance maladie est déséquilibré. Le seul véritable pouvoir des syndicats est de quitter la table de négociation ou de s’opposer à l’application d’un amendement. Nous en sommes venus là car ce modèle conventionnel doit être complètement revu.
Par ailleurs, nous demandons au Gouvernement d’ouvrir des travaux avec les syndicats des professionnels de santé libéraux pour définir un modèle conventionnel plus équilibré et plus efficace. Une des voies de ce travail pour recentrer le débat sur les enjeux de santé publique serait d’indexer les honoraires des professionnels de santé à 70% sur l’inflation et de fonder les autres revalorisations sur les arbitrages liés aux enjeux de santé publique en lien avec la profession concernée.
Si nous voulons retrouver l’excellence de notre système de santé, cette évolution des relations contractuelles doit s’accompagner d’un changement de paradigme qui consiste à considérer les dépenses de santé non plus comme un coût, mais comme un investissement pour la santé de nos concitoyens.